mardi 17 juin 2014

Grève des cheminots : y'en a marre (mais vraiment!)


La raison de ma colère (et non pas le raisin, je risquerais de provoquer la grogne des viticulteurs dont les vignes souffrent des grosses chaleurs, ou de la grêle je ne sais plus trop…), je la dois avant tout à ma curiosité. J’aime « farfouiller » sur le net, pour y lire les news, les infos fraîches à toutes heures, et pour aussi tenter de comprendre certains faits relatés dans les médias.

Si je me contentais de l’information que m’apporte le JT de France 2 d’Elise Lucet (que j’apprécie) ou de David Pujadas (que j’apprécie aussi, qu’il se rassure), je finirais par penser que les conflits civils en Ukraine ou en Russie sont de simples « guéguerres »  sans motifs, ou que Boko Haram est un type à la barbe drue et longue. Cela dit, les choses pourraient être pires, si je regardais Jean-Pierre Pernaut sur TF1 (remarquez que je ne mets aucun lien vers son profil). Je pourrais alors penser que le monde tourne autour des ostréiculteurs d’Oléron ou des bergers du Cantal, en passant évidemment par les triplés qui passent leur bac… (High five Pernaut, t’es trop balaise ! Là, je mets quand même le lien de cette petite arnaque à la JP Pernaut)
Ce qui m’amène précisément à écrire cet article, c’est cette petite rage que provoquent en moi les mots qui sortent allègrement de la bouche de certains qui font genre « je maîtrise le sujet, moi ! » Et des comme ça, il y en beaucoup (pour ne pas dire trop... Si disons le, il y en a trop!).
Depuis la grève contre la réforme ferroviaire, il est un mot que j’entends 10 fois par jour (seulement 10 fois si je ne regarde pas un JT, quelle que soit la chaîne de télé- parce que si je mets BFM en boucle, en période de grève, je risque l'overdose), et que je lis plus souvent encore dans la même journée (presse écrite, internet, réseaux sociaux…) : c’est le mot OTAGE.

Les voyageurs sont pris en otage, les bacheliers sont pris en otage, bref, les gens sont pris en otage.
Pourtant, jamais dans le même sujet TV ou dans le même article, le mot OTAGE n’est associé à un mouvement radical ou protestataire extrémiste, qui voudrait nuire à une nation, qui revendiquerait de quelconques échanges financiers ou libération de prisonniers… Non, en fait, personne dans ce débat, n’est réellement pris en otage. Au départ, les « pseudo-otages » voulaient faire usage de rhétorique. Mais aujourd’hui, les « pseudo-otages » semblent croire à la métaphore et à leur propre mise en scène.

Des otages, nous en connaissons, comme Serge Lazarevic, enlevé au Mali en novembre 2011 (je complète mon article : libéré en décembre 2014, mon article a été publié en juin 2014), qui, s’il avait vent du conflit autour de la réforme ferroviaire en France, pourrait avoir besoin de préciser quelles sont les conditions de vie d’un otage, d’un vrai : alimentation pauvre, contact avec l’extérieur et la famille impossible, limitation des soins médicaux, hygiène déplorable, distraction niveau zéro, menace par arme à feu quotidienne, privation de toute forme de loisirs… Bref, lui est bien pris en otage, mais par AQMI, et non pas par la SNCF. A choisir, quelque chose me dit qu’il préférerait la seconde option. D’ailleurs, un autre otage était à ses cotés jusqu’au 10 mars dernier, avant d’être décapité par AQMI…Pour ne pas faire de jaloux, je dénonce également les FARC, l'IRA et le Hamas.

Pour les étudiants « pris en otage », étudiants d’une génération autre que la mienne, qui ne semblent pas aussi concernés par le monde qui les entoure et l’Etat qui les dirige, à combien se chiffrent le nombre de prises d’otages abouties de ces fameux cheminots terroristes?

D’après Benoît Hamon, ministre de l’Education Nationale, "Le bilan est plutôt bon, on a eu très peu de retards." En effet, il a raison de le dire ainsi, dommage qu'il n'ait pas ajouté à cela les chiffres publiés par son ministère, qui stipule que cette année, on comptait 2311 absents, contre 3360 en 2013 (bel écart!). Il faut dire qu'avec les autocollants magiques imaginés par la Direction de la SNCF, on a pu faire une sérieuse mise en place sur le terrain, en accompagnant presque main dans la main les étudiants à leur table de composition pour l'épreuve de philo. Soulagement général donc, les cheminots ne seront pas responsables du taux d'échec éventuel du bac 2014. 

Alors pourquoi les « gens » se sentent « pris en otage » ? Pourquoi ils utilisent des mots aussi forts de sens pour définir leur situation ?
Rappelons avant tout pourquoi les « gens » deviennent des usagers de la SNCF :
Avant tout, ils s’éloignent des proches banlieues des grandes villes et investissent dans des biens immobiliers dans des zones d’habitation complètement excentrées, à des dizaines de kilomètres de leur lieu de travail. C’est un choix respectable, surtout quand on connait les prix du m² dans les grandes villes.
Mais ce choix de mode de vie implique quelques efforts et quelques sacrifices : la première boulangerie est à 10 km (et ce n’est pas forcément la meilleure de la région, mais la suivante est à 25 km…) et comble du comble, le boulanger ose fermer boutique le lundi, ôtant ainsi le pain de la bouche des excentrés. Le boulanger ne tenterait pas lui aussi une prise d’otage de sa baguette ?!
Autre sacrifice du banlieusard qui s’installe à la cambrousse : l’école des enfants. C’est tout un rituel qui se met en place. Réveil de « mon poussin » à 5h45, petit déj’ vite fait (va manger à 5h du mat toi !), on enfile les vêtements préparés la veille (on fait tout pour gagner du temps), on se coiffe et on se brosse les dents (pendant 3 minutes, on tient sa brosse à la verticale et on fait un mouvement de rouleau - ne riez pas - l’hygiène buccale c’est super important), et on est prêt pour prendre le car de 6h27. Dans le meilleur des cas, le car est à seulement quelques centaines de mètres de la maison (on ne laisse pas « mon poussin » faire le chemin tout seul pour autant, on ne devrait pas en tous cas), dans le pire des cas, on prend la voiture pour
déposer « mon poussin » à l’arrêt du car (on ne tient pas compte du verglas en hiver, qui a tendance à glacer davantage les routes de campagne). Après 30 minutes de car et 5 arrêts, « mon poussin » arrive enfin à l’école… Il devra attendre que la cloche sonne 8 heures pour rentrer en classe. Sa journée scolaire à la campagne a donc commencé à 5h45, et finira ce soir vers 18h00, si le car n’a pas de retard et si vous êtes à l’heure pour le récupérer à l’arrêt du car. Et si vous n'y êtes pas, "mon poussin" sera pris en otage !?! Au final, en hiver, vous ne voyez jamais votre enfant à la lumière du jour : il part il fait nuit, il rentre il fait nuit…
Oui, je dramatiiiise, évidemment, je romance, mais est-ce que j’en rajoute vraiment beaucoup ?
Bon après avoir déposé « mon poussin » à l’arrêt du car, il faut rejoindre le bureau, dans la direction inverse, évidemment, puisque la gare, elle non plus, n’est pas dans votre village, elle est à quelques bornes de là (10/15 minutes en voiture, mais vous n’êtes plus à ça près).
Pour aller du point A (la maison) au point B (le travail), plusieurs moyens : utiliser votre voiture, covoiturer (c’est la mode) ou prendre les transports en commun (TC).  Si vous êtes majoritaires à opter pour les TC en Ile-de-France, c’est aussi parce que les frais sont souvent réduits. De nombreux employeurs ou les collectivités prennent en charge la moitié des frais de transport, notamment en région parisienne, mais pas seulement. Voilà une économie sur l’usure du véhicule, sur le poste de dépense des transports, et sur le temps de trajet. Là encore, c’est un choix respectable, les temps sont durs pour tout le monde (pour tout le monde, il paraît, si l’on ne tient pas compte du fait que le secteur du luxe connait sa plus belle période de croissance…)
Et pour certains, qui habitent loinnnnnn de leur lieu de travail, souvent dans une autre région, les TC sont inévitables. Pour exemple, ils sont de plus en plus nombreux à s’installer à Reims, mais continuent de travailler à la Capitale, qui n’est qu’à 45 minutes en TGV, deux villes qui restent pourtant à 145 km l’une de l’autre. Difficile d’imaginer faire la route en voiture (à moins de ne pas avoir de famille, d’amis, de loisirs et de ne vivre que pour le boulot, j’en connais.)
Après ce petit rappel, je ne vois toujours pas de lien avec une éventuelle prise d’otage potentiellement et hypothétiquement possible (je laisse quand même le doute planer).

Concernant les témoignages « des gens » pris en otage non pas par la SNCF, mais par les cheminots (l’accusation est encore plus poignante, parce qu’on personnifie une entreprise, avec un nom dur à porter : « cheminot »), les situations de « prise d’otage » ne semblent pas non plus coller avec la réalité d’une vraie prise d’otage. Dans les différentes scènes que j’ai pu observer, relatées dans les journaux télévisés, j’ai pu voir des décors pas tout à fait comparables avec ceux des FARC ou de l'IRA.
  • Témoignages sur les quais d’une gare
  • Témoignages dans le hall d’une gare
  • Témoignages dans les rues
  • Témoignages même dans les voitures des particuliers, qui ont finalement décidé de prendre leur véhicule pour se rendre coûte que coûte au travail.
  • Témoignages d’élus locaux, régionaux ou nationaux, devant des lieux « représentatifs » de la Nation (mairie, préfecture, ministère…)

Bref, les gens n’apparaissent pas menottés ou ligotés, ils ne sont pas non plus contraints de lire un texte soumis par les cheminots (comme le fait le Hamas en imposant une lecture assidue des revendications de leur leader). Non, rien de tout cela, parce que finalement, les gens sont « libres », ils ne sont ni emprisonnés, ni assujettis. Ils restent libres de leurs mouvements, libres de choisir d’attendre un train qui sera sans doute bondé ou de finalement faire le trajet en voiture ou de pourquoi pas rester chez eux ou imaginons le pire, de faire grève. (Je blague !)

Ces mêmes « pseudo-otages » sont d’ailleurs aussi la plupart du temps contre le droit de grève. Là aussi, un petit rappel s’impose, pour ne pas oublier à quoi ils s’opposent…
  • Le droit de grève s’inscrit dans la Constitution et reste un droit reconnu depuis la Libération. Certains pays se battent d’ailleurs encore au 21è siècle pour obtenir ce droit et pouvoir eux aussi revendiquer leur mécontentement (comme la Birmanie, en 2011).
  • Ce que les « pseudo-otages » oublient souvent, c’est qu’eux aussi ont le droit de faire grève. Pour rappel, une fois n’est pas coutume, voilà ce que dit la loi sur le droit de grève :
  • Le droit de grève est un droit reconnu à tout salarié (privé et public confondu).
  • Pour être valable, la grève doit réunir 3 conditions : un arrêt total du travail, une concertation des salariés et des revendications professionnelles.
  • Dans le secteur privé, les salariés peuvent utiliser leur droit de grève sans respecter de préavis (contrairement aux salariés fonctionnaires ou assimilés comme les cheminots, qui eux doivent impérativement émettre un préavis de grève).
  • La grève peut être de courte durée (1h au minimum) ou bien se poursuivre durant une longue période.


Maintenant que les choses sont claires, il nous faut nous rendre à l’évidence : seuls les fonctionnaires et les assimilés (comme les cheminots, je me répète, mais il est important de ne pas croire que les cheminots sont des fonctionnaires) appliquent ce droit de grève.

Pourquoi ? Il y a plusieurs réponses à cette question et je ne prétends toutes les apporter :
Les salariés du privé acceptent leurs conditions de travail, sont satisfaits de leur salaire, de leur convention collective et de leurs horaires.
Les salariés du privé n’osent pas se mettre en grève par peur de perdre leur emploi. On imagine pourtant difficilement qu’un patron qui paye mal ses employés, et/ou qui impose des conditions de vie professionnelle difficiles licencie tout son personnel en grève… Mais ça, on ne peut pas le vérifier, car jamais ou rarement, les salariés du privé n’osent se rebeller.
Autre explication, les salariés du privé ignorent qu’ils ont (eux aussi) le droit de faire grève. Je prends alors toute la mesure de cette information que je leur transmets, et me rends compte qu’une partie des insatisfaits du privé (il y en a forcément parmi eux qui ont des revendications professionnelles, puisqu’ils disent toujours : « nous, dans le privé, tu crois que…et que…bah non ! ») risquent désormais de se lancer dans des revendications et devenir grévistes à leur tour, à la limite du terrorisme.
Mais peut-être qu’au fond, les « pseudo-otages » ne veulent pas voir diminuer leur salaire. Oui, parce qu’il y a une chose que je n’ai pas encore précisée : la rumeur qui dit que les cheminots sont payés même en grève, c’est vraiment une rumeur. C’est comme la rumeur qui dit qu’Amanda Lear est un homme ou que Mickael Jackson est encore en vie. Non, Amanda Lear est une femme (je le sais, je l’ai vu à poil quand elle était petite), MJ is dead (navrée pour la brutalité de l’info) et les cheminots  grévistes perdent une partie de leur salaire…comme n’importe quels autres grévistes d’ailleurs.

D’ailleurs, combien ils perdent les preneurs d’otage ?
Malgré la fausse rumeur (une de plus) d’une caisse noire qui servirait à payer les jours de grève (rumeur qui mérite quand même d’être sévèrement démontée), sachez qu’on décompte une journée de travail de son salaire au p’tit cheminot gréviste. A ce titre, il faut savoir d’ailleurs qu’une journée non travaillée représente un montant plus élevé qu’une journée travaillée. Donc 7 jours de grève = 7 jours de salaire déduits, mais parfois plus, puisque les repos compris entre 2 jours de grève, sont eux aussi considérés comme des jours de grève.
La seule chose que pourraient négocier les cheminots sur ce point, c’est l’échelonnement de cette perte salariale sur un ou deux mois. Mais même pour obtenir ça, il faut aller faire des ronds de jambe et des courbettes, et sortir ses meilleurs arguments de futur pauvre en devenir, comme si le montant à 3 chiffres en bas à droite, ne suffisait comme argument…

Et pourquoi on fait grève ? Pourquoi on prend les gens en otage au fait ?
Il aurait peut-être fallu commencer par ça. Mais je n’aurais pas réussi à vous tenir en haleine jusqu’ici si j’avais sorti les grands mots dès le départ…
Si les cheminots manifestent leur mécontentement (à nouveau), c’est parce qu’un Gouvernement de Gauche (pour lequel ils ont d’ailleurs voté majoritairement en 2012), les prend un peu pour des couillons, n’ayons pas peur des mots. Oui, parce qu’en 1997, l’Etat avait voulu séparer la gestion des infrastructures SNCF du fonctionnement global de l’entreprise, pour « soulager » la SNCF de la dette lourde qui reposait sur la gestion du réseau. On a donc confié cette mission à RFF (EPIC financé finalement très largement par les redevances payées par ses clients, dont SNCF, son client le plus important). Cette séparation des deux entités a fait l’objet d’un mouvement de grève, oui encore un. On passait d’une ligne hiérarchique à deux lignes, en laissant les cheminots dans le plus grand flou quant au fonctionnement prévu par RFF et par la SNCF. Mais l’Etat décida alors de se moquer des revendications, effectua la scission, et fonça tête bêche (j’aime bien cette expression). L’histoire ne s’arrêta pas là, elle reprit un jour de l’année 2013, quand l’Etat s’aperçut que ce ne fut pas la solution idéale.
Aujourd’hui, 17 ans plus tard, on s’aperçoit que ça ne marche pas. Alors comme il y a 17 ans on avait un Gouvernement de Droite, on veut évidemment tout changer dans ce Gouvernement actuel de Gauche. Du coup, on démonte ce qu’on avait construit, en omettant de chiffrer les coups engendrés par une telle refonte du système ferroviaire. On n’y voit que les « avantages » soit 1,5 milliards d’euros de déficit en moins par an. Mais là, on nous parle d’un temps qui n’existe pas encore. On peut d’ailleurs douter du bien fondé des chiffres annoncés par le gouvernement Hollande, si l’on se réfère à la croissance annoncée en 2012 (promesse non tenue), à la baisse de chômage annoncée (promesse non tenue) et on s’arrêtera là, parce que la nausée a quand même déjà du mal à passer…

Ce qu’on peut dire de la réforme annoncée :
Soyez concentrés, car vraiment, c’est pas facile. Eloignez « mon poussin », coupez les portables et débranchez la sonnette, il va falloir être attentif quelques lignes…
SNCF (l’entreprise des terroristes) va devenir le patron de RFF (qui devient SNCF Infra) et de SNCF (qui devient SNCF Mobilité). Vous êtes perdus ? C’est normal. Parce que la fameuse SNCF que l’on connait tous, était déjà bien « filialisée » et elle le sera plus encore. Et qui dit filiales, dit ouverture à la concurrence. Et qui dit ouverture à la concurrence, dit «n’importe quoi ». On connait déjà les ravages sur le Fret SNCF. Mais je ne maitrise pas assez le sujet pour en faire un exposé. D’autres sauront mieux que moi, développer les faits concernant le Fret.
J’avais un peu la flemme de dresser la liste des filiales et des groupes SNCF, j’ai donc préféré une jolie image (source sncf.com). Je vous laisse faire le calcul, mais je sais parfaitement que vous ne le ferez pas, ça ne sert à rien, d’autant que si la réforme passe, tout ceci va encore changer…


Tiens ! Ca me fait d’ailleurs penser qu’on ne nous parle pas des frais « parallèles » (pour ne pas dire des « dommages collatéraux »), qui comprennent toute la paperasserie, les en-têtes des lettres, des enveloppes, les plaques des immeubles, les cartes de visites de nos cadres, les plaques de portes de ces mêmes cadres… 

Mais pour résumer, ce que veut le Gouvernement qui se dit de Gauche, c’est démolir petit à petit le géant Légo SNCF. Seulement, à démonter une si grande structure, on risque de perdre quelques pièces au passage, et comme dirait Oldelaf, « quand tu marches pieds nus sur un tout petit légo », bah « ça fait mal » !

Bref, les terror… non, les agents SNCF pardon, ou les cheminots, comme vous préférez, font eux aussi partie de la boite de Légo, pour le moment tout du moins. Mais avec les nouvelles missions de la Direction (parce qu’ils ne font qu’exécuter les ordres, j’en ai bien conscience), il n’est pas certain que le plan de montage de la nouvelle « structure » soit livré avec la boite de jeu. On risque alors des assemblages bancals. Quant aux petits bonhommes SNCF sur les voies, en cabine de conduite et dans les trains (tout est compris dans le pack), il semblerait que la réforme veuille leur ôter un statut pour lequel ils se sont durement battus. Les conditions de travail partaient d’un niveau tellement bas, à la création de la SNCF (en 1938), qu’il paraissait légitime à nos anciens cheminots, de batailler pour un monde meilleur. Les grèves, ils ont connu eux aussi, mais ils se battaient alors pour avoir 2 jours de repos par semaine ou pour avoir quelques dimanches de libres dans l’année. Grâce aux combats des anciens (Big up les gars !), on arrive à peu près à quelque chose de convenable. Mais pourtant, depuis quelques années, les gouvernements se succèdent et se ressemblent, et semblent vouloir détruire la culture d’entreprise si chère à la SNCF (ou plutôt aux cheminots). Seulement les petits bonshommes de cheminots ne se laissent pas toujours faire. Et quand on touche à leur socle, ils décident de se rebeller, de revendiquer et de faire entendre leur mécontentement. C’est à ce moment là qu’ils deviennent des terroristes, qu’ils enfilent les cagoules, se laissent pousser des barbes de 3 mois, roulent les « r » et s’expriment à la façon de E.T (oui, les références sont totalement opposées, j’en conviens, mais on s’en fout).
Les cheminots sont des durs à cuire, et pourtant, ils donnent l’impression parfois de se battre pour des broutilles, comme l’âge de la retraite par exemple (humour).

Tiens ça me fait penser à un autre petit rappel à faire. La r’traite, 40 piges inside !
Voilà une autre rumeur qui a la peau dure. Les cheminots partent à 50 ans. Ne faites pas semblant de ne pas le savoir. Vous aussi vous y avez cru un jour où l’autre. Et j’espère que ce n’est pas ce qui vous a motivé à « rentrer » dans le cercle si « fermé » de la SNCF, parce que vous devez être sacrément en pétard. Désolée, mais vous ne partirez pas à 50 ans. Si seulement ! 

Pour l’exercice, je viens de faire une petite simulation sur l’outil disponible sur internet pour le calcul de la retraite. On va voir si je fais toujours des envieux :
Sans manipulation de ma part, l’outil me propose un départ possible en 2034 (encore 20 ans à faire), mais en 2034, j’aurai déjà 38 ans de cotisations salariales et je soufflerai ma 58è bougie le lendemain de mon jour de retraite (c’te fiesta !). 
Et le chiffre donné en bas à droite, c’est la pension « trimestrielle » = 2913€. 
Si je divise par 3, je n’atteints même pas 1000 € de pension mensuelle (j’ai fait le calcul de tête, car je suis un peu fortiche en maths). 
Qui de nos jours, dans le privé, cotise pendant 38 ans pour arriver avec 971 € de retraite à 58 ans ? (Là j’ai pris ma calculatrice.)

La DREES (Direction de la recherche, des études, des évaluations et des statistiques) précise qu’en 2012, la pension moyenne des retraités en France s’élève à 1288€/mois. 

Mais je suis bonne joueuse, alors j’ai fait cette même simulation, mais en appliquant 41 années de cotisations, et je me décide alors à partir à 61 ans, ce qui devrait largement changer la donne et me placer au-dessus de la moyenne, d’après ce que j’entends à droite et à gauche (surtout à droite, mais de plus en plus à gauche).

Grande déception ! Tout le monde dit des conneries. Parce qu’en cotisant au maximum, soit 42 ans, j’arrive à 1135€/mois. Je suis encore en dessous de la moyenne générale des français en 2012. Alors je ne perds pas espoir, mais je reste inquiète. Parce qu’en 2038, elle sera de combien la moyenne de pension d’un retraité français ? Peut-être sera-t-elle encore plus importante, puisque nous vivrons au moins 100 ans, et nous travaillerons donc jusqu’à 75 ans. Oui, parce qu’on estime que 25 années à glander en retraite, c’est déjà bien assez. Les médecins auront (je l'espère) avancé dans leurs recherches et travailleront en duo avec les industriels pour inventer des nouveaux postes de travail, sur lesquels nous pourrons travailler tout en restant allongés, perfusés et sondés pour les plus atteints, et pas forcément les plus vieux. Ça va sentir bon dans les bureaux ! Espérons qu’il restera quelques valides pour ouvrir les fenêtres et aérer tout ça !

Bon, je m’éloigne du sujet. Où en étions-nous avant de nous retrouver au boulot avec une couche hygiénique ? Ah oui, les otages…

Je vous rassure, je vais conclure, mais avant, je voudrais donner toutes leurs chances aux otages, de pouvoir eux aussi, un jour, devenir des cheminots terroristes. Oui, parce qu’à baver sur le statut « cheminot », à jalouser notre âge de jeunot à la retraite, je pense qu’il est important de donner une solution de repli à tous ces gens pas contents d’être pris en otage.
La solution : devenir cheminot ! Bah oui, autant venir juger par eux-mêmes comment ça se passe à la maison. Coup de chance, la boite embauche : 3 000 postes à pourvoir sur les métiers techniques. 

Profil recherché (je traduis en langage normal) :

Si vous aussi, vous avez envie de faire votre prise de service à 6h du matin, et que vous n’avez pas peur de travailler de nuit, y-compris les week-end et les fériés, 
Si vous non plus, vous ne craignez pas de ne pas pouvoir prendre vos vacances en Juillet, mais plutôt en Juin ou en Septembre, pour ne pas nuire au fonctionnement du service (oui, parce qu'en période estivale, les otages remplissent les TGV avant de remplir les plages),
Si vous aussi, vous avez envie de vous gelez les fesses par – 15°C en hiver ou de suer par 42°C en été sur les voies, sur le ballaste ou dans les tunnels, 
Si vous aussi, vous rêvez de planifier vos soirées entre potes 3 mois à l’avance (parce que les trucs sur le pouce, ça va devenir compliqué), alors soyez les bienvenus. Venez rejoindre cette équipe de gai-lurons. 
On ne vous garantit pas la retraite à 50 ans (mais ça vous n’en voulez pas), 
On ne vous garantit pas une retraite confortable (mais ça vous vous en moquez), 
On ne vous garantit pas une vie de famille épanouie (les weekend s’appelleront des jours travaillés mais vous serez au moins tranquille pour faire vos courses le mardi ou le jeudi, sur vos jours de repos)...
Mais il ne suffira pas de tambouriner à la porte et de dire « Hey, Guigui, je veux être cheminot ! » (private joke). Bah non, il y a quand même quelques marches à grimper :
  • Il faudra déjà que votre CV soit retenu. 
  • Ensuite il faudra bien répondre à la dame ou au monsieur lors de l’entretien téléphonique de présélection, sinon « au revoir ». 
  • Après, il faudra réussir les tests (personnalités, techniques, mises en situation,…). 
  • Si vous les réussissez, il faudra séduire les recruteurs, les psychologues du travail. 
  • Et pour finir, il faudra montrer patte blanche au Docteur de la maison, qui ne laissera rien passer ! 
Mais après une année à faire vos preuves, vous deviendrez alors un preneur d’otage en herbe, bref, la grande classe. Et ça sera partie pour 40 ans de bons et loyaux services (si vous tenez jusque là, évidemment), de grèves hebdomadaires (c’est bien connu « les cheminots sont toujours en grève »), et de primes à toutes les sauces.

Les priiiimes!!!


Ouh ! J’ai failli oublier de vous parler des primes, celles qui font que les cheminots sont là encore des « privilégiés », des limites riches, voire même des « petits bourgeois » (je ne vous dirais pas qui m’a dit ça, vous risqueriez de vouloir lui péter la gueule). Alors, bande de petits bourgeois ? (Demandez moi son nom en MP.) On cumule les primes ? Prime de charbon (vous y croyez encore vous ?), prime de vapeur (celle-là elle est de moi), prime de tirefond (pourquoi pas ?), prime de caillou (ça marche aussi avec chou, hibou, genou…), prime de la prime (pour le top du tableau)… Je suis en fait obligée de les inventer, car je n’en ai jamais vu la couleur, d’où ma déprime (je vous laisse apprécier…)
Alors oui, avouons le, certains métiers donnent lieu à des primes, mais les cheminots ne sont pas des exceptions et quelque chose me dit (l’Histoire en fait), que les anciens se sont battus pour certaines de ces primes (mais tous les prétextes sont bons pour jouer les méchants en cagoule). Pourtant, rappelons (navrée des rappels à foison, mais bon, tout le monde ne sait pas tout comme vous), rappelons donc que ces primes ne sont pas prises en compte dans le calcul de la retraite, mais le sont dans le calcul des impôts (bah oui, quand même !)
Et puis, le petit plus des cheminots, ce sont « les transports gratuits ». Alors ça, ça fait rêver ! Bon, ça ne vaut pas les transports Air France, mais si vous avez peur en avion comme moi - "Ah bon, t'as peur en avion? Mais tu sais que pourtant c'est le moyen de transport le plus sûr!" - autant bosser à la SNCF. Oui, parce qu’en effet, on ne paye presque pas le train (juste des résas à 20 € sur les TGV).
Et comme on a plein de temps libre, parce qu’on est des feignasses, et comme on gagne plein de sous, parce qu’on est quand même payés si on fait grève, on a que ça à faire de prendre le train gratuitement, parce qu’on adore ça. 
On peut aller partout en France, pour seulement 20€. Bon, certes on dort dans les halls de gares et on fait la manche auprès des restaus pour manger une fois sur place, mais on s’en moque, on paye pas le train ! Par contre, revers de la médaille (enfin la médaille c'est au moins 25 ans de service!), quand on voyage en train, il nous arrive à nous aussi d'être parfois pris en otage par nos propres collègues (un monde de fous je vous dis!)...

(Merci à mon compère, complice et qu'on...non, ça suffit, mais merci à lui pour ses bonnes idées, ses corrections et sa patience. Oui bon ça va, c'est pas non plus "le truc de l'année", faut pas exagérer...)

1 commentaire:

Valérie GOUGET a dit…

Merciiiiii i je suis contente que qqn nous comprenne